DANS LE STUDIO DE LEANNE PICTHALL, NYON

Au moment où je la rencontre, mi-janvier, dans son studio à Nyon, la jeune femme finalise les œuvres de sa présentation solo avec la galerie Skopia pour le salon Art Genève (Palexpo, 30.01 – 02.02.25). Après une très prometteuse première proposition à la galerie genevoise sise Rue des Vieux Grenadiers, Leanne Picthall, confirme sa volonté de faire les choses les unes après les autres, sans trop se projeter dans l’avenir. Jusqu’à présent, elle a toujours eu la chance de travailler sur les projets qui lui sont proposés en enchaînant.

Fraîchement diplômée de la HEAD en juin 2023, elle reçoit le Prix Tremplin Leenaards/HEAD en Arts Visuels et c’est la même année que l’artiste participe à l’exposition collective organisée par Jung Kunst à Winterthur. Lorsqu’elle rencontre Pierre-Henri Jaccaud de la galerie Skopia par l’intermédiaire de l’un de ses professeurs de l’École de Design et Haute Ecole d’Art du Valais, elle confie avoir été très impressionnée et ne pas s’attendre à grand-chose. Elle a tort. Le galeriste lui proposera sa première exposition personnelle en juin 2024.

Au cœur de l’émotion

Sur les murs de son studio, plusieurs peintures sont accrochées : presque toutes terminées, elle confie avoir connu un période de blocage au moment où elle a accepté de faire une proposition pour le salon : « c’était compliqué car il faut simplement faire : faire ce qu’on veut et ne pas faire une peinture en pensant que la précédente a marché. J’essaie de ne pas trop analyser. » Au départ et pendant ses études, elle explique n’avoir peint presque que des autoportraits : un travail hyper introspectif avec des sujets très rapprochés dont elle semble vouloir s’éloigner. L’artiste n’aime pas se répéter et se plaît à explorer de nouvelles directions dans sa pratique tant dans les formats utilisés qu’avec des bribes de phrases hors contexte déposées sur de petites toiles, comme pour se rappeler de ne pas les oublier…

Les peintures à l’huile de Picthall sont fondamentalement connectées à ses états d’âme et à sa façon de vivre émotionnellement les événements qui lui arrivent. Ce sont ces mêmes émotions qui informent sa démarche et qui laissent place au rationnel dans un deuxième temps seulement. Cet aspect désarmant de la représentation à la Chantal Joffe, l’artiste le cultive avec une honnêteté touchante. Quand on se plonge dans les œuvres de Leanne Picthall, c’est de l’authenticité que l’on ressent. Le spectateur est soudain propulsé dans l’intimité d’un moment vécu intensément et une certaine proximité s’installe naturellement car c’est à travers les yeux de l’artiste que la situation est décrite.

Avec l’intuition comme point de départ, le travail de Picthall n’est cependant pas dénué d’intention. Qu’il s’agisse de situations réelles ou de compositions mises en scène, c’est finalement toujours la part d’imprévu qui remporte la mise. Un regard sans filtre suffisamment déterminé pour laisser place à une certaine ambivalence se pose sur les compostions qui révèlent souvent une contradiction ou une indécision. « Mes tableaux me font me poser plus de questions qu’ils ne me donnent de réponses » me glisse-t-elle lorsque je lui demande si elle arrive à une conclusion concernant les situations qu’elle révèle sur ses œuvres. Il s’agit donc plus de moments de questionnements qui marquent un temps de pause, un entre-deux suspensif dans lequel il est bon de s’arrêter pour mieux ressentir. Le quotidien, le banal, voilà ce que nous montre Leanne Picthall. A nous d’aller chercher l’émotion qui s’y cache.

A découvrir à l’occasion de Art Genève du 30 janvier au 2 février sur le stand de la galerie Skopia.