« Thank you for changing my life. Lives are hard to change. »
Ce sont les mots de Ser Serpas (1995) qui mettent un point final à la liste de personnes qu’elle remercie à l’occasion de sa grande exposition solo (la plus grande à ce jour en Suisse) Oh My Life, à la Kunsthalle de Bâle.
Il y a tant à dire sur la proposition de cette artiste visuelle originaire de Los Angeles qu’essayer de saisir l’ensemble de sa démarche n’aiderait pas à ressentir ce que l’on vit en expérimentant ses oeuvres en personne. Chacun des aspects de son travail en révèle d’autres, plus puissants, plus fugaces plus poétiques aussi… Passée par la HEAD à Genève où elle rencontre Mohamed Almusibli, l’actuel directeur de la Kunsthalle et curateur de cette exposition, elle fonde avec lui le project space Cherish aux côtés de James Bantone et Thomas Le Lann. Egalement diplômée de l’Université de Columbia, NY, Serpas vit entre New York et Genève. Représentée depuis ses débuts par la galerie zurichoise Karma International, elle obtient le prix Reiffers Art Initiatives en 2023 et présente la même année, I fear, à la Bourse de Commerce à Paris. Actuellement, elle montre également son travail au MOMA PS1, NY, dans une exposition collective. Autant dire qu’elle est partout. Et nulle part…
Retour à Bâle. La présence de l’artiste flotte dans l’air des cinq salles que son art a investit: les peintures XXL sur toiles libres se font face, témoins d’une présence passée, exhibent des corps aux contours flous, fragiles et physiques. Par sa technique de superposition d’une toile sur une autre alors que la peinture n’est pas encore sèche, Serpas crée des silhouettes fantomatiques oscillant entre deux états, qui finalement décrivent un mouvement. Le transfert de matière qui s’opère d’une toile à l’autre pendant ce procédé laisse une empreinte et crée un décalage visuel qui permet d’approcher ces corps comme des images non définies ou des fragments marqués par leurs vulnérabilité. C’est la transformation qui compte ici: Serpas qui choisit ses images dans des archives digitales générées pas l’intelligence artificielle, les transforme, les travaille et les élargit jusqu’à en devenir méconnaissables. La palette de couleur chair caractéristique de l’artiste permet la reconnaissance des corps qui s’offrent à nous avant de disparaître sous nos yeux. Les oeuvres de Ser Serpas incarnent une présence extraordinairement physique tout en étant parfaitement insaisissable. A ne pas manquer, jusqu’au 21 septembre.

photo: Philipp Hänger / Kunsthalle Basel

photo: Philipp Hänger / Kunsthalle Basel

Foto: Philipp Hänger / Kunsthalle Basel

Foto: Philipp Hänger / Kunsthalle Basel

photo: Philipp Hänger / Kunsthalle Basel