ALFREDO ACETO X LANGE + PULT, GENEVE

Pour sa première exposition personnelle chez Lange + Pult à Genève, l’artiste Alfredo Aceto propose une nouvelle série d’oeuvres faisant partie d’un corpus plus large. Cet artiste multi-disciplinaire dont la pratique traverse sculpture, photographie, installation et écriture, propose des créations suspendues entre présent et passé, entre réalité et une fiction. Questionnant et explorant les thèmes de l’identité, de la mémoire et du temps, Aceto s’empare avec mélancolie et finesse de l’histoire que raconte les pièces qu’il créé. Les sculptures-objets de l’artiste convoquent un temps révolu qui resurgit avec le potentiel narratif sous-jacent des pièces.

Les bleus à l’âme

Ici, les Campanulas de Aceto le ramènent dans le préau de son école à Turin ou plus jeune, il a expérimenté des moments difficiles et traumatisants. Véritable voyage dans le temps et dans la mémoire meurtrie de l’artiste, la proposition s’articule autours de la pièce horizontale bleu clair, qui rappelle la ligne de l’horizon, le bleu du ciel et de la mer ou il fait bon se réfugier et s’évader quand la réalité frappe trop fort. Ce bleu, c’est aussi la couleur de la mousse qui recouvrait les poteaux du préau de cet établissement isolé, témoins des années de solitude profonde de l’artiste. Cette matière que Aceto passera le plus clair de son temps à modeler, trouer, façonner à son image comme pour créer un alter-ego, est également sa première rencontre avec la sculpture. Modifier l’aspect de cette mousse malléable est une parade à son isolement physique mais aussi acoustique car l’artiste, atteint d’amusie, ne perçoit pas les mélodies. Sa condition d’adolescent traversé par la solitude se voit alors amplifiée par la non perception de certains sons et cela coupe le jeune artiste encore un peu plus de l’environnement qui l’entoure. Cet isolement d’un autre genre se voit ici mis en scène par la présence des cloches qui ne sonnent pas: l’objet est là mais c’est l’absence sonore qui révèle l’histoire personnelle de l’artiste: « le son est la mais pas vraiment activé. C’est la potentialité sonore plus que le son lui même dont il est question ».

Véritable conteur d’histoires, Aceto nous prend la main pour lever le voile sur cette part de lui qui se découvre par petits bouts au fil de ses créations.

Les cloches, qui viennent s’imbriquer dans diverses surfaces, parfois en trompe l’oeil, parfois lisses, brutes ou encore colorées, sont autant de facettes de la personnalité artistique de Aceto qui tente de s’affranchir des frontières entre l’intérieur et l’extérieur, à l’image de cette photographie prise à Genève sous le pont de la Coulouvrenière près d’un parc pour chiens. Entre celui qui regarde et l’animal pris sur le vif, il y a cette barrière métallique qui coupe le regard et créé une séparation nette.  Chez Aceto, il y a autant de potentialités que d’empêchements. A découvrir à la galerie Lange + Pult, Rue des Bains 22 à Genève, jusqu’au 3 mai.